Globalement, dans notre société il y a une injonction aux émotions et aux pensées positives, nous n’avons pas le droit d’avoir des pensées et des émotions négatives et ceci est un problème. L’homme doit apprendre à accepter ses émotions plutôt qu’a toujours vouloir le contrôler ou le supprimer. Voici pourquoi selon les 4 mythes décrit par Russ Harris dans son livre le piège du bonheur:
Mythe 1: Le bonheur n’est pas l’état naturel de l’homme
Le bonheur n’est pas l’état naturel de l’homme. Nous avons évolué en étant en permanence dans un état de menace pour pouvoir survivre. Surveiller qu’un prédateur ne s’approche pas, que le feu est toujours bien alimenté ou encore que la viande du bison tué la veille n’est pas en train de pourrir. D’après la théorie de l’évolution, les êtres humains qui ont survécu et transmis leurs gênes sont ceux qui étaient les plus adaptés pour la survie, c’est-à-dire ceux qui étaient capable de rester sur le qui-vive, de nourrir de la peur pour le monde extérieur, peut-être parfois plus que de raison.
Aujourd’hui la survie n’est plus réellement un enjeu en France au XXI siècle. Mais quelques centaines d’années sur les millions d’années d’évolution de notre cerveau est si infime qu’aucun changement ne se produit sur cette échelle temporelle concernant la structure de notre cerveau. Notre cerveau évolue beaucoup moins rapidement que le monde dans lequel nous vivons, c’est ce qu’on appelle le mismatch: le décalage entre le stade d’évolution de notre cerveau et le monde dans lequel nous vivons. Nous vivons aujourd’hui dans un monde hyperconnecté avec le cerveau de chasseur cueilleurs.
Si vous souffrez, que vous êtes malheureux, vous n’êtes pas anormal. Au contraire si vous souffrez et que vous apprenez à accepter vos émotions, c’est une réaction saine.
Bien plus saine que toutes les personnes qui sont dans le déni de leurs souffrances et qui donnent l’image aux autres que tout va à merveille pour elles (mais ceci est aussi un mécanisme de défense et de survie pour tenter de ne pas se faire exclure du groupe).
Mythe 2: Les personnes malheureuses ont un problème
Nous avons tendance à voir des signes de faiblesse ou de maladie chez les personnes qui ressentent de la tristesse ou de l’anxiété.
Nous n’avons pas un problème lorsque nous sommes anxieux ou malheureux, il est tout à fait normal de ressentir ces émotions.
Les pensées négatives restent accrochées à notre cerveau qui y repense et les rumine. Encore une fois, c’est ce qui a permis aux hommes de Cro-Magnon de survivre que d’accorder tant d’importance aux informations négatives comparativement aux informations positives.
Les pensées positives font plaisir, mais elles glissent sur le téflon que nous sommes. Par contre les pensées négatives restent solidement accrochées à notre velcro. C’est ce qu’on appelle le biais de négativité, nous avons tendance à accorder plus d’importance aux informations négatives qu’aux informations positives.
Il est donc normal de ressentir des émotions négatives et nous devons les accepter.
Mythe 3: Pour avoir une vie meilleure il faut se débarrasser des émotions négatives
Nous vivons dans une société de plaisir, obsédée par le bonheur. Vous faites probablement toutes vos actions parce que vous pensez qu’elles vont vous rendre plus heureux.
Vous cherchez à performer dans votre sport parce que vous pensez qu’en performant vous serez plus heureux. Vous buvez un verre de vin parce que vous pensez qu’il vous rendra plus heureux (ou moins malheureux) et enfin vous faites du bénévolat pour la même raison.
Tout n’est qu’une question d’équilibre, de polarité. Les émotions négatives ont leur intérêt. Sans émotions négatives il n’y aurait pas d’émotions positives.
Les pensées négatives ont leur intérêt. La colère la tristesse et l’anxiété font partie de notre vie. Il est impossible de les supprimer. Il faut à la place chercher à les vivre pleinement pour ainsi les traiter et pouvoir les laisser passer.
Toute émotion qui est combattue est renforcée. Toute émotion qui est acceptée est traitée, gérée. L’émotion est de l’énergie, elle est en mouvement. Mais lorsque nous tentons de contrôler ou de supprimer l’émotion, nous la contenons en nous et parfois nous la renforçons. C’est en acceptant nos émotions que nous pouvons permettre à l’énergie de circuler, de venir en nous puis de pouvoir repartir. C’est pourquoi nous devons apprendre à accepter nos émotions.
Mythe 4: Nous devons contrôler nos pensées et nos émotions
Chaque émotion a son utilité: la colère, la tristesse, la peur, la joie, la culpabilité…
Toutes nos émotions sont ressenties pour des raisons. Elles viennent nous renseigner sur nos besoins psychologiques.
Une émotion agréable nous informe que nous sommes en train de cheminer vers l’un de nos besoins psychologiques. Une émotion désagréable nous signale que nous nous éloignons d’un ou plusieurs de nos besoins psychologiques.
Nos émotions nous permettent donc de comprendre quels sont nos besoins psychologiques pour pouvoir ensuite mieux y répondre.
Par exemple, si un arbitre siffle une faute, que je m’énerve parce que j’estime qu’il n’y a pas faute dans ce cas de figure, cela peut signifier que j’ai un besoin psychologique de justice.
Dans la même situation, si un arbitre siffle une faute et que je m’énerve parce que la faute est sifflée sur moi, cela peut signifier mon besoin psychologique de performance (à ce moment je ne me sens pas performant). Derrière mon besoin de performance peut se cacher le besoin d’admiration, d’être aimé par les autres ou de me sentir inclus au sein de mon équipe par exemple.
Il est donc primordial de développer la capacité d’aller creuser derrière nos émotions pour comprendre quels sont les besoins psychologiques qui les sous-tendent.
Nos émotions et nos pensées sont des nuages, nous devons simplement les observer pour pouvoir ensuite les laisser passer. Il est primordial d’accepter ses émotions pour pouvoir comprendre les besoins psychologiques qui sont derrière celles-ci. Si vous supprimer ou contrôlez vos émotions vous ne pourrez pas comprendre quels sont vos besoins psychologiques.
Pensez-vous que vous contrôlez vos pensées et vos émotions ? Vraiment ?
Imaginez-vous avant une compétition très importante, stressé, en manque de confiance, rempli de doutes et d’incertitudes.
Vous avez des pensées du genre:
- « Cet adversaire a tel classement et moi celui-ci, je ne dois pas perdre »
- « Je dois absolument faire un bon match aujourd’hui »
- « Qu’est ce que mon entraîneur va penser si je rate ? »
Alors vous essayez de contrôler ces pensées, vous vous répétez:
- « Le classement ne veut rien dire, je le sais bien »
- « Je vais faire un gros match »
- « Je sais que mon entraîneur a un avis positif de moi et il n’y a pas de raison que cela change »
Vous vous répétez ces pensées le plus fort possible, vous essayez d’y croire tant bien que mal, pourtant…
Vous ressentez toujours cette boule au ventre, vous avez toujours le cœur qui bat rapidement et vous transpirez très facilement (sans que cela ait de lien avec votre échauffement).
Vous avez beau essayer de contrôler vos pensées en répétant toutes ces phrases, vous n’y croyez pas.
Prenez un peu de recul et réfléchissez à ce que vous faites en agissant ainsi. Vous avez besoin de vous mentir à vous même pour créer en vous un semblant de sentiment de confiance. Mais au fond de vous vous ne croyez pas à tous ces mensonges que vous vous racontez. Vous savez bien que vous n’êtes pas le meilleur et que vous n’allez pas tous les éclater.
Si vous avez besoin de vous mentir pour ressentir un semblant de sentiment de confiance, vous êtes en train de tuer votre estime de soi. Vous vous envoyez le message que pour ressentir de la confiance en vous, vous avez besoin de vous mentir. Comme si vous n’étiez pas capable de ressentir une confiance en vous qui soit réelle et profonde.
Il ne suffit pas de vouloir avoir confiance ou être heureux pour pouvoir avoir confiance ou être heureux. La pensée positive détruit l’estime de soi à long terme. C’est pourquoi plutôt que de contrôler ses pensées et ses émotions il faut plutôt les accepter.
Voici une caricature de ce que prône la pensée positive:
T’es stressé ? Bah arrête et prends confiance en toi, c’est facile.
L’étude de David Lykken sur le bonheur
Le généticien David Lykken a mené une étude dans laquelle il a étudié le niveau de bonheur de paires de jumeaux monozygotes (vrais jumeaux) qui ont été séparés à la naissance et ont grandi dans un environnement totalement différent.
Puisque les jumeaux ont été séparés à la naissance, cette expérience permet de comparer l’impact de la génétique sur le niveau de bonheur, peu importe l’environnement dans lequel l’individu grandit. En effet, les vrais jumeaux ont une grande part de patrimoine génétique en commun.
David Lykken en conclut que le niveau de bonheur des vrais jumeaux séparés à la naissance était plutôt similaire. Notre niveau de bonheur est donc bien plus déterminé par notre génétique que ce que nous pourrions penser. Selon cette étude, notre niveau de bonheur serait déterminé entre 50 à 80% par notre génétique. Ce qui fait la différence entre les 50 à 80% c’est ce que David Lykken appelle la loterie corticale. En d’autres termes, le hasard de votre génétique déterminera quelle part de celle-ci influencera votre niveau de bonheur.
Pour autant, nous gardons 20 à 50% de part d’influence sur notre niveau de bonheur. C’est pourquoi nous pouvons tenter d’influencer l’environnement dans lequel nous nous trouvons (qui influence notre niveau de bonheur) ainsi que de choisir quelles sont les activités dans lesquelles nous nous investissons. Est-ce que vous vous investissez dans des activités riches et pleines de sens ?
Faut-il accepter ou contrôler ses émotions ?
-Voici ce qui se passe lorsque vous tentez de contrôler ou même de supprimer vos émotions:
Nos émotions ne sont que des messages envoyés par notre corps pour nous informer de nos besoins psychologiques. Si je ressens de la frustration pour une faute injustement sifflée par l’arbitre, c’est parce que j’ai un besoin psychologique de justice qui n’est pas satisfait à ce moment-là.
Lorsque vous ressentez des émotions agréables, c’est que vous êtes en train d’accomplir vos besoins psychologiques, à l’inverse vous ressentez des émotions désagréables lorsque vous vous éloignez de ceux-ci.
Pouvoir mettre des mots sur ses besoins psychologiques est très important, cela permet de comprendre que ce que je ressens est normal et de comprendre pourquoi je ressens cela à ce moment précis. Si je peux modifier la situation pour rétablir la justice et faire respecter mon besoin psychologique, c’est aussi possible, mais ça n’est pas toujours le cas.
Le plus important étant d’être à l’écoute de nos besoins psychologiques plutôt que de nécessairement les satisfaire à tout prix, car ce n’est pas toujours possible.
-Voici ce qui se passe lorsque vous acceptez vos émotions:
Vous ressentez la même émotion, mais vous vous autorisez à la vivre. Vous ne jugez pas l’émotion comme étant particulièrement positive ou négative et vous ne vous jugez pas de ressentir cela. Vous êtes capable d’observer les symptômes de l’émotion dans votre corps et de ne pas chercher à les contenir. Vous êtes en train d’accepter vos émotions.
Vous cherchez peut-être même à comprendre quels sont les besoins psychologiques non respectés qui vous font vivre cette émotion. En l’occurrence vous comprenez que vous ressentez de l’anxiété parce que votre besoin de compétence n’est pas respecté dans votre sport. Vous avez le sentiment de ne pas être assez compétent. Cela vous fait vous retrouver dans une situation importante pour vous (la compétition) que vous jugez également incertaine, vous n’êtes pas sûr de parvenir à atteindre vos objectifs et de pouvoir vous sentir compétent.
À partir de là peuvent venir plusieurs questions :
-Pourquoi ai-je ce besoin de compétence ? Vient-il combler un manque ? Lequel ?
-Est-il possible pour moi de répondre à mon besoin de compétence par d’autres domaines que le sport ?
Enfin, voici ce que des sportifs qui figurent parmi les plus grands champions de leur sport disent sur l’acceptation des émotions.
Pour mieux comprendre pourquoi accepter ses émotions plutôt que de les contrôler et comprendre comment faire, vous pouvez vous inscrire à ma newsletter ou lire mes livres la préparation mentale en sport ainsi que performance automatique.
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