Comment devenir un homme ?

devenir un homme

Publié le 12 août 2024

En tant que psychologue spécialisé dans la préparation mentale des sportifs je travaille avec une patientèle composée à 90% d’hommes. Ils me confient ce qu’ils ne confient à personne d’autre : leurs doutes, leurs peurs et leurs émotions.

Un certain nombre d’entre eux peuvent se poser des questions telles que « Comment devenir un homme ? » ou encore « C’est quoi être un homme ? » J’ai donc été amené à les faire réfléchir sur ce sujet lorsque leurs interrogations le concernait.

En tant que psychologue je ne donne pas de conseils, contrairement à ce que pourraient penser  la plupart des individus. J’offre aux personnes avec qui je travaille un cadre pour réfléchir différemment, plus en profondeur aux questions qu’ils se posent et ainsi provoquer ce que l’on appelle un « insight » ou une prise de conscience.

Aujourd’hui, on peut distinguer 2 archétypes caricaturaux et opposés dans la société : l’homme déconstruit et le mâle alpha. Ces deux archétypes empêchent les individus qui plongent dans ces cases d’être pleinement eux-mêmes, c’est-à-dire de devenir homme, voici pourquoi :

Pour devenir un homme : éviter les archétypes du mâle alpha et de l’homme déconstruit

L’homme déconstruit

Être déconstruit signifie retirer les constructions sociales que la société nous a inculqué : un homme doit paraitre fort ou ne pas pleurer par exemple. L’homme déconstruit veut s’émanciper des normes que la société patriarcale lui a transmise. Sa volonté part d’une noble intention, mais elle pourra ensuite engendre des problèmatiques dans son quotidien…

En rejetant les normes traditionnelles, l’homme déconstruit peut parfois se sentir perdu ou sans direction claire, ce qui peut mener à une crise identitaire.

Parfois, dans l’effort de se distancer des traits alpha, l’homme déconstruit peut surcompenser en adoptant des attitudes qui ne lui sont pas naturelles, ce qui peut mener à une autre forme de pression et d’inconfort.

L’objectif n’est pas de se déconstruire pour paraitre fragile et déconstruit aux yeux des autres (ce qui est valorisé par une certaine partie de la population). Il est de se déconstruire des normes sociales avec lesquelles nous ne sommes pas en adéquation pour simplement devenir un homme, c’est-à-dire devenir soi.

C’est la thèse que je défends dans cet article. L’objectif n’est pas de chercher à correspondre à un archétype, que ce soit celui de l’homme déconstruit ou celui du mâle alpha. Il est de simplement pouvoir être soi-même.

Le mâle alpha

Le male alpha n’est qu’un masque. Une forme de construction sociale à laquelle un grand nombre d’hommes participent, mais sont aussi victimes. Comme si on ne pouvait pas être autre chose qu’une brute sans émotion ou un bourreau de travail qui écrase tout sur son passage.

Tandis que l’homme déconstruit tente de retirer de sa personne, le male alpha tente de s’en inventer une. N’existerait-il pas un entre 2 ?

Pour devenir un homme il faut être capable d’être soi-même, mais ce conseil est tellement bateau et a été donné par tous qu’il n’a plus aucun sens. Comment faire pour être soi-même ?

Comment devenir un homme sans rentrer dans un archétype ?

Plutôt que de chercher à ressembler à l’un des deux archétypes précédents, être soi-même correspond bien souvent à quelque chose entre l’homme déconstruit et le mâle alpha. Vous pouvez chercher à prendre le positif de chacun des 2 archétypes en rejetant leur part négative. Cela peut inclure ces différents traits :

  • Flexibilité et adaptabilité : Être capable de montrer de la force et de la vulnérabilité selon les situations.
  • Relations équilibrées : Favoriser des relations basées sur le respect mutuel et l’authenticité plutôt que sur le pouvoir ou la conformité.
  • Bien-être personnel : Prioriser la santé mentale et émotionnelle, et ne pas hésiter à chercher de l’aide ou du soutien en cas de besoin.
  • Réflexion continue : Rester ouvert à la remise en question de ses propres attitudes et croyances tout en étant indulgent envers soi-même dans ce processus de croissance personnelle.

Les 3 erreurs à éviter pour devenir un homme

Je recense au minimum 3 erreurs qui empêchent les hommes de devenir homme, d’être pleinement eux-mêmes:

Vouloir devenir quelque chose à tout prix (erreur numéro 1)

Les hommes ont peur de la honte, du sentiment d’être un moins que rien, de ce que les autres pourraient penser d’eux, de l’inutilité à la vue de tous.

Face à cela un grand nombre d’hommes ressentent profondément le besoin d’accomplir quelque chose, de devenir quelqu’un, de faire de grandes choses : Prendre en charge, s’engager dans la tâche, être dans le faire et avoir des responsabilités.

Cette volonté n’est absolument pas un problème. Ce qui peut être problématique, c’est la cause pour laquelle on peut souhaiter cela. Est-ce pour combler un besoin de reconnaissance ?

C’est souvent le cas. Là encore, ce n’est pas nécessairement un problème. Il est plutôt normal de désirer être admiré des autres. Mais trop souvent, ce besoin se fait ressentir d’une force incommensurable.

Le travail est une thérapie pour les hommes. « Être un homme c’est travailler beaucoup, énormément et longtemps » pensent certains. C’est ce qui permet à un homme de se sentir utile et ainsi de ressentir de la joie.

Les hommes peuvent avoir l’impression de devoir porter le poids du monde en s’inscrivant dans un projet. Ils sont prêts à tout sacrifier et s’oublier derrière ce projet pour devenir quelqu’un. Se sentir utile jusqu’à se bruler les ailes s’il le faut.

Nos stades, gymnases, salles de concert, assemblée nationale, etc… sont pleins d’hommes ayant fait ce choix.

C’est une manière pour l’homme de se faire voler sa vie.

En psychologie, on parle de la notion de locus de contrôle. Le locus de contrôle c’est ce qui détermine si vous avez le sentiment d’avoir le contrôle ou non de votre vie. Le locus de contrôle peut être plus ou moins interne ou externe :

Locus de contrôle externe : « Si j’ai raté cette compétition c’est à cause de l’arbitre il m’a totalement pourri. »

Locus de contrôle interne : « J’ai raté cette compétition, car je n’ai pas été assez bon. »

Il est plutôt sain d’avoir un locus de contrôle interne et donc de prendre la responsabilité de sa vie. Toutefois, ceci est vrai seulement jusqu’à une certaine mesure.

Messieurs, vous ne pouvez pas tout contrôler. Vous n’êtes pas responsables de tout et vous ne pouvez pas prendre le monde sur vos épaules. Dédiez-vous à quelque chose par amour de cette chose là, mais jamais pour vous oublier vous-même.

En effet, rentrer dans un sacrifice perpétuel permet de s’oublier. J’écris bien permet, car cela peut avoir une utilité. En s’oubliant derrière un projet ou une responsabilité, on ne réfléchit plus à soi, l’utilité étant d’éviter une forme d’angoisse latente. Nous reviendrons bientôt sur la question des émotions et de leur évitement.

Avoir une vision malsaine de la compétition (erreur numéro 2)

L’homme est un animal social. Nous avons besoin d’amitié et de camaraderie. L’objectif est d’atteindre la saine camaraderie. C’est se battre comme un lion dans la cage, puis s’aimer une fois que l’on sort de la cage. C’est donner son maximum dans le combat par respect de son adversaire et non par haine envers lui.

Ne fuyons la compétition, parce que la compétition fait partie de la vie. Et la compétition peut être belle lorsque nous savons porter un regard juste sur celle-ci.

Les hommes bons ont compris que l’objectif n’était pas le résultat, mais bien le processus. Peu importe qui l’emporte. L’autre me permet de me dépasser, de donner le meilleur de moi. De la même manière, je lui permets de se dépasser et de donner le meilleur de lui. C’est ce qui est beau dans la compétition.

Aimez la compétition parce que c’est le lieu qui vous pousse à donner le meilleur de vous. Pas parce que c’est le lieu qui vous permet de prouver votre supériorité par rapport aux autres.

Appréciez le goût de l’effort, plus que le goût du sang.

Eviter ses émotions (erreur numéro 3)

Les hommes pensent qu’ils ne doivent surtout pas paraitre faibles. Qu’ils ne doivent pas montrer leurs émotions.

Il ne faut parler de soi, de ses échecs, de ses peurs ou de ses doutes. Ce serait laisser ouvert la porte à l’autre pour nous frapper.

Nous cachons toujours plus nos émotions. Nous avons l’impression que ressentir des émotions nous rend faible et les exprimer est signe d’un manque de contrôle de soi, une forme de défaite aux yeux de tous.

Souvent, les hommes n’ont pas grand-chose à dire. Ils peuvent aimer l’humour ou parler du match de Champions League à venir.

Mais parler de soi ou de ses problèmes ? Jamais.

Lorsque nous devenons un robot, que nous passons uniquement en mode production, il peut nous arriver de parvenir à accomplir des choses et de recevoir les compliments des autres. Nous nous enfermons alors encore un peu plus dans ce mode de fonctionnement. Mais viens un moment où lorsque nous tentons de communiquer avec les autres, notamment des personnes qui vivent et ressentent des émotions, la connexion ne se fait plus comme avant. Un décalage s’est créé. Et ce n’est pas un décalage dû à une différence de statut social, mais bien à une différence de connexion à ses émotions.

Éviter ses émotions c’est se protéger.

Le message de nos émotions

Ressentir nos émotions est souvent quelque chose de désagréable. Alors on les enterre, on les cache, on les supprime pour ne pas y avoir affaire. Seulement, si nos émotions sont désagréables, elles ne sont jamais inutiles. Ce sont simplement des messages que notre corps nous envoie pour nous dire ce qu’il a à nous dire.

Nous avons tous des besoins psychologiques. Lorsque nous ressentons une émotion agréable, cela signifie que nous sommes en train de répondre à l’un de nos besoins psychologiques. A l’inverse lorsque nous ressentons des émotions désagréables cela signifie que nous nous éloignons de nos besoins psychologiques.

En prenant en apprenant à écouter nos émotions, nous devons capables de comprendre nos besoins psychologiques. Par exemple, ressentir de la colère c’est bien souvent le message que nous envoie notre corps nous signifier que notre besoin de justice n’est pas comblé.

Lorsque nous sommes capables que nous avons les tempes crispées et le cœur qui bat un peu plus vite, c’est-à-dire que nous sommes en colère, que cette colère est présente parce que notre besoin de justice n’est pas comblé, alors nous pouvons réfléchir à comment combler ce besoin. Parfois ce ne sera pas possible et nous pourrons choisir de lâcher prise là-dessus.

Mais si nous n’écoutons pas l’émotion et la mettons simplement de côté, nous ne comprenons pas tout cela et la prochaine fois que la situation qui a déclenché la colère se produira, l’émotion reviendra encore plus fortement.

Notre corps nous envoie des messages. Tant que nous ne les écoutons pas, ils reviendront de manière toujours plus forte.

L’évitement expérientiel

C’est en chassant toutes les émotions en soi que nous les rend encore plus puissantes.

Nous avons souvent tendance à éviter, cacher ou supprimer nos émotions douloureuses/désagréables, c’est ce que l’on appelle l’évitement expérientiel. L’évitement expérientiel permet de se protéger de la douleur immédiate de l’émotion. Cependant, cette stratégie augmente la souffrance à long terme.

Par exemple, éviter l’anxiété qui peut être associée à des situations sociales ou à la rencontre avec d’autres individus nous poussera à réitérer ce genre de comportements. Nous deviendrons au final des êtres inadaptés socialement qui ont peur de sortir de leur maison ou de passer un coup de téléphone parce que nous avons pris l’habitude d’éviter les situations sociales parce nous ne voulions pas nous confronter à l’anxiété qui pouvait être associée à celles-ci.

Conclusion

Devenir un homme est quelque chose de bien loin de l’archétype de l’homme déconstruit ou du mal alpha. Au lieu d’essayer d’atteindre un idéal décrit par un archétype, il existe un entre-deux : être soi-même. Devenir un homme c’est simplement apprendre à être soi-même en toute circonstance. Pour cela, les hommes doivent apprendre notamment à comprendre qu’ils peuvent avoir de la valeur sans nécessairement n’avoir accompli de grandes choses aux yeux de la société, apprendre à avoir une relation plus saine à la compétition et enfin à accepter leurs émotions plutôt que de les éviter.

Rédigé par Marc - SportMental

Je suis psychologue du sport et préparateur mental. J'aide les sportifs qui veulent progresser à bâtir un mental d'acier par le développement de leurs habiletés mentales.

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